Aurélie Nemours entre amis

Ode Bertrand, Charles Bézie, Jean-François Dubreuil, Gottfried Honegger, Jean Leppien et Henri Prosi

Exposition passéeDu 17 mars au 29 avril 2023

Cette exposition rassemble, autour des œuvres d’Aurelie Nemours, les œuvres de quelques-uns de ses amis. Grande artiste abstraite et géométrique de la deuxième partie du XXème siècle, Aurelie Nemours (1910-2005) a su fédérer autour d’elle un grand nombre d’artistes avec lesquels elle entretenait quantité de discussions animées sur l’art. A vrai dire, dans sa quête d’absolu, elle a rencontré des contemporains comme Jean Leppien (1910-1991), avec lequel les arguments sur les croix étaient sans fin, Gottfried Honegger (1917-2016) qui l’a beaucoup soutenu, prônait l’art constructif avant tout, avec force et conviction.
Parmi la génération suivante, impressionnée par cette ténacité, comme par son engagement auprès de cette abstraction, nous retrouverons Ode Bertrand, Charles Bézie, Jean-François Dubreuil ou encore Henri Prosi (1936-2010).

Aurelie Nemours, peintre de la construction de l’instant, travaillant par thèmes et séries tout au long de sa carrière, avec des passages de la couleur au noir et blanc, réalise une œuvre qu’elle-même préfère qualifier de construite.
D’évidence, elle touche le cœur des gens qu’elle et sa peinture croisent, peu de collectionneurs se défont de ses œuvres, elle habite les intérieurs privés. Ses réalisations par toutes petites touches de pinceaux, de préférence à l’huile, qui pour elle est une matière vivante, donnent à ses toiles un aspect vibrant, renforçant le mystère voire le mystique de ses œuvres.

Jean Leppien, élève de Kandinsky et Albers au Bauhaus, se détache peu à peu de ces influences en rejoignant un travail sur les croix, chemin commun à Aurelie Nemours et surtout vers ses fameux cercles qu’il nomme UFO (unidentified flying object). Le choix de sa palette dès le départ est très influencé par son environnement, ses nombreux séjours dans le sud de la France éblouissent son regard, ce ciel bleu, la luminosité des paysages, rouge, vert, jaune, finissent par l’ancrer à Roquebrune, où il trouve un atelier. Il n’y a pas de systématisme dans ses compositions, ni dans le choix de sa palette, même si l’œuvre gagne en réduction, ce n’est plus l’enseignement d’Albers qui prédomine mais juste sa sensibilité et son environnement méditerranéen. Son humour et un œil aiguisé, lui faisait dire d’un tableau qu’il avait réalisé, qu’il devait tenir assez longtemps au mur sous son regard afin de savoir si ce qu’il venait de peindre était vraiment un tableau.

Gottfried Honegger, peintre-sculpteur, utopiste invétéré, militant de la première heure, a passé son temps à défendre l’art constructif. Voici ce qu’il écrivait à propos de son projet d’un musée pour l’art concret et d’Aurelie Nemours :
« Toi aussi, tu voulais un lieu où l’art constructif est préservé, vécu par le public.
[…] Au printemps 2004, une utopie va se réaliser. L’art des créateurs de tous bords s’unira pour agir, servir. Au cœur de cet édifice, se trouvera une salle dans laquelle ton œuvre sera exposée.
L’espace de l’Art Concret, à Mouans-Sartoux, cette œuvre, tu y as participé, tu l’as espéré, tu l’as inspirée. » extrait Gottfried Honegger Homo Scriptor- Les presses du réel – 2004
De ses tableaux-Reliefs, ses reliefs et ses sculptures, se dégage une unité de pureté et d’émotion, la délicatesse du mouvement et la simplicité de la forme. Depuis les années 50 la géométrie aléatoire est le fondement essentiel de son œuvre.

Ode Bertrand, peintre remarquable, fine observatrice, toujours à l’affût d’une conversation sur l’art et ses nouveautés a directement plongé dans l’abstraction géométrique, sans passer par la case représentation. A bonne école avec Aurelie Nemours, sa tante qu’elle a accompagnée de nombreuses années, elle a pu ensuite faire le grand saut. Il faut être acharné pour réaliser au tire-ligne, ces œuvres graphiques, des œuvres magiques. Comme un tableau en appelle un autre, alors qu’elle dit ne pas être à l’aise avec la couleur, elle finit pourtant par l’aborder, des tonalités sourdes tranchent avec des couleurs primaires. Mais la forme reprend la main et la série des rubans jetés au hasard, leurs plis, la ramène au noir et blanc.

Charles Bézie, amoureux des chiffres, de nombre d’or en suite Fibonacci, n’a eu cesse de rechercher la séquence numérique, comme un trésor, qui convenait le mieux à ses œuvres. Le noir a beaucoup prédominé ses créations, proche de Nemours dans son travail de recouvrements successifs, mais à l’acrylique, relève aussi d’une prouesse technique. Il est persuadé, à plus d’un titre, que l’abstraction géométrique est une source d’harmonie et de plénitude.

L’étonnement de Jean-François Dubreuil de se retrouver qualifié de peintre, le surprend encore. Pourtant il suit et découvre avec grand enthousiasme les œuvres d’Aurelie Nemours et Gottfried Honegger, avec lesquels il tisse de forts liens d’amitiés. Les membres de l’Oulipo peint l’auraient probablement accueilli en leur sein, avec ses analyses quantitatives de supports d’information. Ces dernières se soldent par de belles constructions existantes (la grille du journal) souvent saturées de couleurs.

Cher Henri Prosi, après tes découpages de toiles recollées en reconstruction sur le tableau, tu ordonnes à la ligne de se faire plus présente, la grille se fait plus fine plus lisible. Tu grossis son trait qui devient bande de couleur, mais tu préfères l’accident qui apparait dans tes dernières œuvres. Le travail en creux, toujours la ligne qui apparait et disparait dans un parcours tout en volume, quel merveilleux voyage que celui-là, tu es malheureusement parti trop tôt pour nous en faire profiter plus.

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Aurélie Nemours entre amis. Ode Bertrand, Charles Bézie, Jean-François Dubreuil, Gottfried Honegger, Jean Leppien et Henri Prosi